jeudi 9 juin 2016

"Si c'est un homme" de Primo Lévi.


“Si c’est un homme” de Primo Lévi.
Ed. Pocket 1999. Pages 315.
Titre Original: “Se questo è un Uomo”

Résumé: On est volontiers persuadé d'avoir lu beaucoup de choses à propos de l'holocauste, on est convaincu d'en savoir au moins autant.
Et, convenons-en avec une sincérité égale au sentiment de la honte, quelquefois, devant l'accumulation, on a envie de crier grâce. C'est que l'on n'a pas encore entendu Levi analyser la nature complexe de l'état du malheur. Peu l'on prouvé aussi bien que Levi, qui a l'air de nous retenir par les basques au bord du menaçant oubli : si la littérature n'est pas écrite pour rappeler les morts aux vivants, elle n'est que futilité.

La 7 de la page 7: “On nous fit alors monter dans des autocars qui nous conduisirent à la gare de Carpi.’”

S’engager dans la lecture d’un roman traitant d’un sujet aussi dur que la guerre et l’Holocauste n’est jamais une tâche très aisée. C’est d’autant plus difficile quand il s’agit d’un récit véritable, un récit témoignage. La ligne, parfois ténue, entre la réalité et la fiction s’efface totalement pour ne laisser que la consternation de l’horreur. Lévi a bien connu la guerre et a bien connu les camps. On est ici en plein témoignage d’un homme brisé par la guerre et par les atrocités innommables dont il a été victime. Et on plonge avec lui dans cette abomination historique. On serre les dents en tournant les pages. On en a presque la nausée à chaque phrase tellement ce récit est poignant, cruel et horrible. Le texte est implacable et continue à enfoncer le lecteur dans les méandres de l’Histoire. Un génocide préparé et exécuté avec calme et ordre. Un barème de l’horreur à chaque page dépassé. Un livre à lire et à conseiller pour que chacun se rende vraiment compte de l’horreur de cette guerre et de l’ignominie dont l’être humain est capable. “Si c’est un homme” est un chef d’œuvre de la littérature de guerre. “Si c’est un homme” est un chef d’œuvre tout simplement.

Extrait:”'J’ai donc touché le fond. On apprend vite en cas de besoin à effacer d'un coup d'éponge passé et futur. Au bout de quinze jours de Lager, je connais déjà la faim réglementaire, cette faim chronique que les hommes libres ne connaissent pas, qui fait rêver la nuit et s'installe dans toutes les parties de notre corps ; j'ai déjà appris à me prémunir contre le vol, et si je tombe sur une cuillère, une ficelle, un bouton que je puisse m'approprier sans être puni, je l'empoche et le considère à moi de plein droit. Déjà sont apparues sur mes pieds les plaies infectieuses qui ne guériront pas. Je pousse des wagons, je manie la pelle, je fond sous la pluie et je tremble dans le vent. Déjà mon corps n'est plus mon corps. J'ai le ventre enflé, les membres desséchés, le visage bouffi le matin et creusé le soir ; chez certains, la peau est devenue jaune, chez d'autres, grise ; quand nous restons trois ou quatre jours sans nous voir, nous avons du mal a nous reconnaître.”

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