mardi 22 septembre 2015

"Ténèbres, Prenez-moi la main" de Dennis Lehane.
Ed. Rivages/Noir 2002. Pages 489. 
Titre original: Darkness, take my hand

Résumé: Une nuit, la psychiatre Diandra Warren reçoit un appel anonyme et menaçant qu’elle croit lié à l’une de ses patientes. Quand arrive au courrier une photo de son fils Jason sans aucune mention d’expéditeur, elle prend peur et demande de l’aide à Patrick Kenzie et Angela Gennaro. C’est pour les deux détectives le début d’une affaire bouleversante qui va les confronter à l’inacceptable, jusqu’à l’imprévisible dénouement. La peur, la compassion, la répulsion, l’amour, toutes ces émotions sont remarquablement mises en scène par Dennis Lehane dans un livre qu’on ne lâche pas avant la dernière page et dont les échos résonnent bien après qu’on l’a refermé.

La 7 de la page 7: "ce qui compte, avait-il écrit, c'est la souffrance." 

Deuxième volet de la sage Kenzie/Gennaro. On reste dans un Boston très sombre. On y ajoute quelques psychopathes de plus. Une histoire en béton. La relation kenzie/Gennaro est de plus en plus ambigüe. On ne sait plus très bien où ils en sont (est-ce qu'eux-mêmes le savent?) 
Pas de déception pour la suite de leurs aventures. A lire sans aucune modération. On attend la suite avec impatience!

Extrait: "Quand j'étais gosse, mon père m'a emmené un jour sur un toit d'un immeuble qui venait de brûler. Il me faisait visiter la caserne lorsque l'alerte avait été donnée, et du coup, je m'étais retrouvé à côté de lui dans la cabine du camion, tout excité de sentir l'arrière du véhicule chasser dans les virages, tandis que les sirènes hurlaient et que la fumée jaillissait devant nous en gros nuages bleus, noirs, épais."

"Un dernier verre avant la guerre" de Dennis Lehane

"Un dernier verre avant la guerre" de Dennis Lehane.
Ed. Rivages/Noir 2001. Pages 344.
Titre Original: A drink before the war

Résumé: Amis depuis l’enfance, Patrick Kenzie et Angela Gennaro sont détectives privés. Ils ont installé leur bureau dans le clocher d’une église de Boston. Un jour, deux sénateurs influents les engagent pour une mission apparemment simple : retrouver une femme de ménage noire qui a disparu en emportant des documents confidentiels. Ce que Patrick et Angela vont découvrir, c’est un feu qui couve « en attendant le jet d’essence qui arrosera les braises ». En attendant la guerre des gangs, des races, des couples, des familles.

La 7 de la page 7: "Oui, monsieur, a-t-elle annoncé." 
 
Premier volet de la saga Kenzie et Gennaro. On entre dans un Boston dur et sombre comme seul Lehane sait le décrire. On y rencontre des êtres méprisables et sans vergogne. On est accompagné de deux détectives assez particuliers qui ne nous donne qu'une seule envie: En avoir plus! On se réjouit déjà de lire les prochains volets. 
Les personnages sont bien fouillés et bien campés. On comprend directement ce qui les fait vivre et ce qu'ils méprisent. 
On est également pris par surprise par l'histoire. Elle nous happe de la première à la dernière page. A lire de toute urgence. 

Extrait: "Le feu fait partie de mes tout premiers souvenirs. J'ai regardé Watts, Detroit et Atlanta brûler au journal du soir, j'ai vu des océans de mangroves et de palmiers partir en fumée de napalm en entendant Walter Cronkite parler de désarmement latéral et d'une guerre qui avait perdu sa raison d'être." 

"84, Charing Cross Road" de Helene Hanff

"84, Charing Cross Road" de Helene Hanff.
Ed. Le Livre de Poche 2012. Pages 160.

Résumé: Par un beau jour d'octobre 1949, Helene Hanff s'adresse depuis New York à la librairie Marks & Co., sise 84, Charing Cross Road à Londres. Passionnée, maniaque, un peu fauchée, extravagante, Miss Hanff réclame à Frank Doel les livres introuvables qui assouviront son insatiable soif de découvertes. Vingt ans plus tard, ils s'écrivent toujours et la familiarité a laissé place à l'intime, presque à l'amour. Drôle et pleine de charme, cette correspondance est un petit joyau qui rappelle avec une délicatesse infinie toute la place que prennent, dans notre vie, les livres et les librairies. Livre inattendu et jamais traduit, 84, Charing Cross Road fait l'objet, depuis les années 1970, d'un véritable culte des deux côtés de l'Atlantique.

La 7 de la page 7: "Pourriez-vous avoir l'amabilité de faire savoir aux gens de l'Eglise d'Angleterre (qui que ce soit qui leur ait donné l'ordre de tripatouiller la Vulgate) qu'ils ont bousillé une des plus belles proses jamais écrites?"

Ode à la lecture, aux lecteurs et aux librairies. Comment deux personnes si différentes que cette américaine excentrique et cet anglais flegmatique d'après-guerre peuvent ils faire pour correspondre? Par les livres bien sûr. Si le roman de Hanff est joliment agencé, force est de constater que cette américaine m'a quand même pas mal agacée. 
Deux mondes se rencontrent par le biais des livres. C'est tout ce que ces personnages ont en commun. C'est la seule chose qui les lient et c'est pourtant grâce à la littérature que leurs vies vont s'entremêler. Entre vie américaine délurée et Angleterre d'après-guerre, seuls les livres servent de passerelles. 
A lire au moins une fois dans sa vie afin de comprendre que les livres sont plus que du papier avec de l'encre jetée dessus. Toutefois, si il est culte dans le monde anglo-saxon, force est de constater que la lecture de ce roman épistolaire est assez rapide mais que le récit à quand même pris un petit coup de vieux. 

Extrait: "Chère Mademoiselle, Je dois vous remercier pour le colis de Pâques qui est bien arrivé hier et nous a fait grand plaisir. Nous avons été ravis par les conserves et par les boîtes d'oeufs frais. Tout le personnel se joint à moi pour vous remercier d'avoir pensé à nous avec autant de générosité." 


 

"Shutter Island" de Dennis Lehane


"Shutter Island" de Dennis Lehane. 
Ed. Rivages/Noir 2009. Pages 393. 

Résumé: Nous sommes dans les années cinquante. Au large de Boston, sur un îlot nommé Shutter Island, se dresse un groupe de bâtiments à l'allure sinistre. C'est un hôpital psychiatrique pour assassins. Le Marshal Teddy Daniels et son coéquipier Chuck Aule ont été appelés par les autorités de cette prison-hôpital car l'une des patientes, Rachel Solando, manque à l'appel. Comment a-t-elle pu sortir d'une cellule fermée à clé de l'extérieur ? Le seul indice retrouvé dans la pièce est une feuille de papier sur laquelle on peut lire une suite de chiffres et de lettres sans signification apparente. Oeuvre incohérente d'une malade ou cryptogramme ? Progressivement, les deux policiers s'enfoncent dans un monde de plus en plus opaque et angoissant, jusqu'au choc final de la vérité.

La 7 de la page 7: "Non, c'était toute cette eau qui s'étendait autour d'eux comme s'il n'y avait plus rien d'autre au monde." 

Petit bijou lu en une soirée! 
L'histoire: au-delà du fait d'être particulièrement bien écrite, elle est diabolique! Dennis Lehane est un être maléfique! Il vous aspire sur cette île et vous fait frissonner en compagnie de Teddy et Chuck. La fin est assourdissante, choquante et  totalement inspirée! Lehane nous emmène jusqu'en haut du phare où on tombe en même temps que Teddy. On souffre et on est en colère tellement cette fin nous est intolérable. On s'envole sous la plume de Lehane, toujours aussi efficace.
Les personnages sont attachants mais en même temps, on est pris de paranoïa et on soupçonne tout le monde. Confiance en personne. Toujours sur nos gardes. 
Ce livre ne se lit pas, il se mange. On engloutit les pages et on en redemande. Véritable tourbillon psychologique, on ne sait plus où donner de la tête. 
Lehane pose une vraie question: jusqu'où notre esprit est-il prêt à aller pour se protéger? 

Extrait: " Il y a des années que je n'ai pas revu l'île. La dernière fois, c'était du bateau d'un ami qui s'était aventurer dans l'avant-port; je l'ai aperçue au loin, par-delà le port intérieur, enveloppée d'une brume estivale, pareille à une tache de peinture laissée par une main insouciante sur la toile du ciel."

"Contes de la folie ordinaire" de Charles Bukowski.

"Contes de la folie ordinaire" de Charles Bukowski.
Ed. Le Livre de Poche 2011. Pages 254.
Titre Original: Erections, ejaculations, exhibitions and general tales of ordinary madness & The most beautiful woman in the world.

Résumé: C'est le moment de s'embarquer dans le bateau ivre de Bukowski, l'écrivain poète, né Allemand, citoyen américain par adoption des rues et des bars, témoin des clameurs urbaines... Virons donc du côté d'une folie ordinaire, celle qui sommeille en chaque individu, celle qui vous prend aux tripes un beau matin et fait du corps une marionnette dont on tire les fils, celle qui s'immisce, reptilienne et ne se tait qu'à la mort.
Bukowski délivre aux lecteurs qui veulent bien le suivre dans sa démarche, les contes quelques peu exubérants de cette lente conquête de la déchéance. D'abord abrupte, trash, la folie se coule peu à peu dans la vie et se fait plus mature. Elle gagne en âge et arrondit les angles, estompe sa vulgarité, s'intériorise, pour finir par adopter le corps physique qu'elle habite. Sexe, alcool, et courses de chevaux sont son lot quotidien : Bukowski parle de Bukowski ; ou plutôt de son double, son extension littéraire au prénom poussif : Hank. Le barfly jubile de son petit tour d'auto-parodie. Il en rajoute avec quelques portraits taillés serrés : des ouvriers alcooliques, des jeunes auteurs déjà accomplis dont l’œuvre le révulse et qui lui renvoient l'image insupportable de son parcours d'écrivain à succès. Car Bukoswki vomit à la face de ses contemporains. Il vomit aussi ses pages, et vous somme de prendre son parti ou de le fustiger.
Certes, l'auteur ne laisse pas indifférent, à la première lecture assurément... à la seconde, on se surprend à trouver les limite de ce trash qui apparaît finalement presque désuet. Et pourtant, cette thématique poursuit sa route, se charge d'une iconographie nouvelle, s'enrichit, s'épanouit, se modèle à l'image du monde moderne. Le trash est clean... il suffit de regarder du côté de la bande d'Irvine Welsh. Changement d'époque, mais même folie... Bukowski a fait des petits ! 

La 7 de la page 7 : "Jolie n'est pas le mot, c'est même presque impoli." 

Dès que j’entends le nom de Bukowski, je pense "Génie". Il fait partie de ces auteurs qui n'ont pas réellement l'attention qu'ils devraient avoir. 
Certes, il n'écrit pas pour les petites filles sages (quoique) et son style est brutal frôlant la vertu de ses mots acerbes et bien choisis.  

Mais commençons par le début, "Contes de la folie ordinaire"compte: 
- Le jour où j'ai rencontré Bukowski. 
- La plus jolie fille de la ville. 
- La vie dans un bordel au Texas. 
- Le petit ramoneur. 
- La machine à baiser. 
- Trois femmes. 
- Trois poulets. 
- Douze singes volants qui ne sont jamais arrivés à baiser. 
- Vie et mort d'un journal underground. 
- Le jour où nous avons parlé de James Thurber. 
- La politique est l'art d'enculer les mouches. 
- Autant qu'on veut. 
- La chatte blanche. 
- J'ai vécu avec l'ennemi numéro 1. 
- Comme au bon vieux temps. 
- Le grand mariage zen. 
- Cons comme le Christ. 
- Pas de chaussettes. 
- J'ai descendu un type à Reno. 
- Carnet d'un suicidé en puissance.
- Le zoo libéré. 

On ne pourra pas nous reprocher de ne pas être exhaustif. 

Venons-en maintenant à ce diable de Bukowski. De quoi traitent ses "Contes de la folie ordinaire"?  De sexe, d'alcool, de critique de la société... Oui, oui, tout ça. Mais bien plus encore. Bukowski met en scène son double littéraire et le place dans des situations rocambolesques. Et tout y passe! La gauche, la droite, les femmes, les hommes, les idiots, les intellectuels (ou du moins ceux qui croient l'être) tout le monde en prend pour son matricule. Mais là où Bukowski tient du Génie, c'est qu'il le fait l'air de rien. La première lecture se fait au premier degré, la deuxième au deuxième et ainsi de suite. 
Alors imaginez quand vous l'aurez lu au moins quatre fois! Chaque histoire possède une multitude de sous-couches. On a toujours plaisir à se vautrer dans l'atrocité des propos de Bukowski qui se pose en ange déchu par la vie et qui ne peut plus rien ni pour nous ni pour se monde dont il se fout totalement. 
Aussi bien de part ses sujets que son écriture, Bukowski déroute son lecteur. Il le provoque avec ses propos grossiers, misogynes et sexuellement explicites. Et en même temps, on ne peux pas vraiment lui en vouloir tant le style nous ressemble.  Il y a un être humain en-dessous, un vrai. Un qui ne se cache pas. On a tous un Bukowski en nous. Même si on nie totalement cette part de nous, Bukowski nous met devant le fait accompli: Nous sommes tous fous et c'est devenu normal. Alors soyons et surtout restons fous jusqu'au bout. 
Bukowski parle de la misère comme personne. Certes elle est sexuelle (parfois intellectuelle ou sociale) mais elle est tellement humaine qu'on se surprend à vouloir prendre cet obsédé sexuel dans ses bras et de lui dire, qu'un jour, ça ira mieux. On lui ment, on se ment, on se bukowskise.

Extraits: "La beauté n'existe pas, la beauté ne dure pas. Toi, tu es laid, et tu ne connais pas ta chance: au moins, si on t'aime, c'est pour une autre raison." 
"Il n'y a que les pauvres qui connaissent la vie; pas les riches ni les planqués. Là bizarrement, je me suis à penser aux Chinois. Les Russes avaient molli; si ça se trouvait, les seuls à connaître la vie étaient les Chinois, les seuls qui piochent la merde, qui crachent le ramollo. Pourtant je ne fais pas de politique, trop d'arnaques: l'Histoire nous encule toujours et tous, à la fin des fins." 


 

"La cuisinière d'Himmler" de Franz-Olivier Giesbert

"La cuisinière d'Himmler" de Franz-Olivier Giesbert.
Ed. Folio 2014. Pages 416.

Résumé: " Ceci est l’épopée drolatique d’une cuisinière qui n’a jamais eu peur de rien. Personnage loufoque et truculent, Rose a survécu aux abjections de cet affreux XXe siècle qu’elle a traversé sans rien perdre de sa sensualité ni de sa joie de vivre. Entre deux amours, elle a tout subi : le génocide arménien, les horreurs du nazisme, les délires du maoïsme. Mais, chaque fois, elle a ressuscité pour repartir de l’avant. Grinçant et picaresque, ce livre raconte les aventures extraordinaires d’une centenaire scandaleuse qui a un credo : «Si l’Enfer, c’est l’Histoire, le Paradis, c’est la vie.»"

La 7 de la page 7: "Les cris et les rires imbéciles des touristes ne me dérangent pas." 

"La cuisinière d'Himmler" était très bien parti. Mais malheureusement, cette traversée "drôlatique" n'a pas été totale. Pourtant le début était prometteur; on y trouvait du rythme, de l'ambiance, on commençait même à s'attacher à Rose, le personnage principal. Et pourtant, au fil des pages, Giesbert m'a complètement perdue. Je tournais les pages sans plus vraiment y croire. 
Le problème de ce livre est qu'il en fait trop. L'auteur tente trop de nous emmener dans un voyage inédit et drôle à travers l'Histoire du XXème siècle. Et on y croit pas du tout.  
Si la volonté de l'auteur était de tourner en ridicule des sombres personnages de notre Histoire, la mission n'est vraiment pas accomplie. On peut sourire des problèmes gastriques nazis mais malheureusement, on ne croit pas à cette dame qui traverse le temps munie de sa liste de vengeance. De plus, le livre passe du génocide arménien à l'Allemagne nazie pour terminer avec la Chine maoïste sans qu'il y ait vraiment de fil conducteur, mis à part Rose. On a parfois l'impression que Giesbert s'est dit "Tiens, après l'Allemagne nazie, on va aller faire un tour en Chine communiste" sans se soucier de la crédibilité de son histoire. 
Une vraie déception. 

Extrait: "Le jour de ma naissance, les trois personnages qui allaient ravager l'humanité étaient déjà de ce monde: Hitler avait dix-huit ans, Staline, vingt-huit et Mao, treize. J'étais tombée dans le mauvais siècle, le leur."

 

"La grammaire est une chanson douce" de Erik Orsenna

"La grammaire est une chanson douce" de Erik Orsenna.
Ed. Le Livre de Poche 2008. Pages 150.

Résumé: Jeanne, la narratrice, pourrait être la petite soeur d'Alice, précipitée dans un monde où les repères familiers sont bouleversés. Avec son frère aîné, Thomas, elle voyage beaucoup. Un jour leur bateau fait naufrage et, seuls rescapés, ils échouent miraculeusement sur une île inconnue. Mais la tempête les avait tant secoués qu'elle les avait vidés de leurs mots, privés de parole. Accueillis par Monsieur Henri, un musicien poète et charmeur, ils découvriront un territoire magique où les mots mènent leur vie : ils se déguisent, se maquillent, se marient.

La 7 de la page 7: "Et alors? Les petits Français n'ont pas droit à de la science exacte?" 

L'histoire du roman n'est que prétexte. Pas besoin de s'y attarder. 
Par contre, le texte en lui-même... Envoûtant, enivrant. 
Orsenna joue avec les mots, les phrases, leur donne vie et substance comme personne. Le sujet de ce livre ce sont les mots eux-mêmes, ils en sont les héros. On lit tout haut les mots afin de les faire rouler dans notre bouche. Orsenna nous fait redécouvrir le Mot de manière spectaculaire. On aurait voulu que le professeur de français nous parle de la grammaire et du vocabulaire avec le même talent qu'Orsenna. C'est splendidement écrit et un véritable plaisir rêveur à lire. Un petit bijou à lire au plus vite.

Extrait: "A vrai dire, c'étaient de drôles de mariages. Plutôt des amitiés. Comme dans les écoles d'autrefois, quand elles n'étaient pas mixtes. Au royaume des mots, les garçons restent avec les garçons et les filles avec les filles. L'article entrait par une porte, l'adjectif par une autre. Le nom arrivait le dernier. Ils disparaissaient tous les trois. Le toit de la mairie me les cachait. J'aurais tout donné pour assister à la cérémonie. J'imagine que le maire devait leur rappeler leurs droits et leurs devoirs, qu'ils étaient désormais unis pour le meilleur et pour le pire. Ils ressortaient ensemble se tenant par la main, accordés, tout masculin ou tout féminin: le château enchanté, la maison hantée... Peut-être qu'à l'intérieur le maire avait installé un distributeur automatique, les adjectifs s'y ravitaillaient en "e" final pour se marier avec un nom féminin. Rien de plus docile et souple que le sexe d'un adjectif. Il change à volonté, il s'adapte au client." 

"Le Pape, le Kid et l'Iroquois" de Anonyme

"Le Pape, le Kid et l'Iroquois" de Anonyme.
Ed. Sonatine 2015. Pages 459.
Titre Original: The plot to kill the pope

Résumé: Vous aimez Grease, le Pape et les psychopathes ? La rencontre explosive du Boubon Kid et du tueur à l'Iroquoise... D'un côté, le Bourbon Kid, tenant du titre du tueur en série le plus impitoyable et le plus mystérieux que la terre n'ait jamais porté. De l'autre, avec plus d'une centaine de victimes à son actif, l'Iroquois, blouson de cuir rouge, masque d'Halloween surmonté d'une crête, challenger et sérieux prétendant au titre.
Le combat s'annonce terrible. Dans les coulisses : une organisation gouvernementale américaine top secrète spécialisée dans les opérations fantômes, une nonne, un sosie d'Elvis, quelques Hells Angels et une cible de choix pour nos psychopathes frénétiques : le pape, en voyage secret aux Etats-Unis. Sur la musique de Grease, nous vous convions au spectacle littéraire le plus déjanté de la décennie.

La 7 de la page 7: "Elle sortit sa carte Visa et la tendit à Steven, qui se tenait devant la caisse, le trousseau de clés à la main, comme s'il se demandait s'il devait l'ouvrir." 

Comme je l'ai attendu ce livre! Le Bourbon Kid et l'iroquois dans le même roman, sous la plume de leur créateur un peu dérangé! 
Et comme en plus, c'est ma moitié qui me l'a offert, c'est dire si j'étais contente! 
Le risque, évidemment, c'est de tellement l'attendre qu'au final on reste un peu déçu. On ne va pas se mentir, ce n'est sans doute pas le meilleur roman d'Anonyme. Mais ce n'est pas pour autant que ce livre soit une déception. Loin de là. 
Le style d'Anonyme est toujours aussi efficace. Un rythme haletant et des situations rocambolesques, à la limite de l'absurde qui se lisent comme on boit un bon vin. 
L'histoire est surtout centrée sur l'iroquois (donc oui, lire "Psycho Killer" est quasiment obligatoire). 
Les personnages sont fidèles à ce qu'ils ont toujours été: complètement barrés! 
Mention spéciale à Jasmine qui nous aura fait rire du début à la fin. 
Un très bon moment de lecture! Attention cependant, vous allez avoir la B.O. de "Grease" en tête pendant des jours et des jours!

Extrait: "L'ambiance rappela à Rex celle des MTV Awards. Il y avait travaillé en tant qu'agent de sécurité, une fois, et avait été chargé d'empêcher les invités de cracher sur un jeune artiste canadien pendant qu'il était sur scène. C'était une des pires missions qu'on lui eût jamais confiées. Il avait passé la moitié de la nuit à écouter des chanteurs tous plus bêtes les uns que les autres balancer les pires banalités sur la politique et l'importance de donner de l'argent aux œuvres caritatives. Le simple fait d'y repenser lui donna des frissons." 


"Psycho Killer" de Anonyme

"Psycho Killer" Anonyme.
Ed. Sonatine 2013. Pages 358. 

Résumé: Tout semble paisible à B Movie Hell, 3672 habitants. Jusqu’au jour où un tueur mystérieux portant un masque en forme de crâne, surmonté d’une crête iroquoise rouge, se mette à assassiner tranquillement certains des habitants de la ville. Le FBI confie l’affaire à un couple d’enquêteurs, Milena Fonseca et Jack Munson, surnommé le Fantôme, spécialiste des opérations clandestines. Bientôt de mystérieux liens apparaissent entre cette terrifiante série de meurtres et un projet top secret du Département d’Etat, l’opération Blackwash. Alors que la paranoïa s’empare de la ville, la collaboration entre le FBI et les autorités locales s’annonce difficile. Les habitants de B Movie Hell, bien décidés à garder leurs nombreux secrets, entendent en effet résoudre seuls et sans aide extérieure cette histoire aussi terrifiante qu’énigmatique.
Après sa tétralogie consacrée au Bourbon Kid, Anonyme nous offre un slasher jubilatoire en forme de clin d’oeil aux films de série B. Est-il possible d’y résister ?

La 7 de la page 7: "Une trentaine." 

Oubliez le Bourbon Kid, il coule des jours heureux dans un monde bien différent de celui exploré ici.
Bon déjà, Anonyme, on l'aime ou on l'aime pas... Personnellement, moi je l'adore. Même s'il  devait se révéler être le fils caché de Gollum et Sylvie Vartan, cet auteur est un génie du gore et de la description frontale qu'on se prend comme un uppercut dans la mâchoire.
L'histoire?  Et bien globalement, il y a un type qui dégomme un tas de gens. On sait pas pourquoi mais on sent qu'il doit y avoir un lien avec cette étrange jeune demoiselle qui pense que la vie c'est comme dans "Dirty Dancing". Si l'histoire est quelque peu prévisible, le style, lui, reste inimitable. 
Si on voit arriver la fin, on s'en fiche un peu parce que une scène de carnage sur "Time of My Life" et "Can't fight the moonlight' c'est quand même du caviar sur canapé! 
Un vrai régal.

Extrait: "Il sortit son téléphone de sa poche. Il était énervé que Fonseca ne soit pas encore arrivée. Il ne pouvait pas quitter le restaurant sans elle car elle n'avait aucun moyen de transport. Il composa son numéro et garda les yeux fixés sur l'écran, qui afficha un téléphone en train de sonner pour montrer qu'il était mis en contact avec Fonseca. Une demi-seconde plus tard, il entendit les Backstreet boys brailler derrière le rideau de la cuisine. Il reconnut la sonnerie de Fonseca. Et la voix de candy, qui étouffa immédiatement un juron." 

"Petite éloge de la vie de tous les jours" de Franz Bartelt

"Petite éloge de la vie de tous les jours" de Franz Bartelt.
Ed. Folio 2009. Pages 130.

Résumé: Dans les brumes ardennaises, Franz Bartelt décortique les petits travers de ses contemporains avec un humour et une férocité jubilatoires.

La 7 de la page 7: "Parce qu'on les voit de loin et de n'importe quel point de ces paysages dont la circularité n'est bornée que par l'horizon." 

Je ne vais pas tergiverser pendant des phrases et des phrases: je n'ai vraiment pas du tout aimé. C'est totalement auto-centré, beaucoup trop auto-centré. Bartelt nous exclut complètement de son récit. Et quand je dis récit... On a l'impression de lire des notes écrite à la "va vite" par un auteur qui n'avait, somme toute, pas grand chose à raconter à la base. 
Je suis totalement passée à côté de "Petite éloge de la vie de tous les jours" et ne le conseille vraiment pas. 

Extrait: "Ce qui est extraordinaire dans nos pays, c'est qu'ils n'ont rien d'extraordinaire. On les parcourt sans jubilation, comme on vit."  

"Seul le silence" de R.J. Ellory

"Seul le silence" de R.J. Ellory
Ed. France Loisirs 2012. Pages 622.
Titre Original: A quiet belief in angels

Résumé: Joseph a douze ans lorsqu'il découvre dans son village de Géorgie le corps d'une fillette assassinée. Une des premières victimes d'une longue série de crimes. Des années plus tard, alors que l'affaire semble enfin élucidée, Joseph s'installe à New York. Mais, de nouveau, les meurtres d'enfants se multiplient... Pour exorciser ses démons, Joseph part à la recherche de ce tueur qui le hante. Avec ce récit crépusculaire à la noirceur absolue, R. J. Ellory évoque autant William Styron que Truman Capote, par la puissance de son écriture et la complexité des émotions qu'il met en jeu.

Lu dans le cadre du challenge "Mois Ellory" organisé par LéaTouchBook 

La 7 de la page 7: "J'y réfléchis un bon moment." 

En ce qui concerne les thrillers, je suis assez exigeante (certains diront psychorigide et je ne peux pas vraiment leur donner tort...) Il me faut du rythme, des personnages en béton armé et une intrigue haletante. Enfin, il me faut tout cela en règle générale... car ici, le rythme est assez lent et l'intrigue presque secondaire. "Seul le silence" était donc voué à me déplaire. Or, le contraire est arrivé. Je me suis attachée à Joseph et l'intrigue a titillé mon imaginaire. Je me suis demandé où Ellory m'emmenait et je l'ai suivi avec plaisir. Jusqu'à la dernière minute, l'auteur maintient un suspens magistralement orchestré. Alors est-ce vraiment un thriller? Oui et non. 
Oui car Ellory utilise les codes du thriller: des crimes, une situation de suspens, un personnage qui se retrouve au milieu de l'intrigue. 
Non car on se focalise beaucoup plus sur le sort de Joseph que sur les crimes en eux-mêmes. On ne se demande pas vraiment qui est l'assassin, on se demande surtout comment Joseph va découvrir son identité et comment cela va l'affecter. 
Pour couper la poire en deux, on dira que c'est un très bon thriller psychologique. 
A lire, vite! 

Extrait: "Après le meurtre de la petite Keppler à Fleming, après avoir rendu visite à ma mère et écouté ses divagations, je me demandais si j'étais destiné à porter le poids de ces fantômes éternellement. Si d'une manière ou d'une autre, j'aurais pu faire quelque chose pour empêcher ces meurtres, et si en ne faisant rien je m'étais condamné à porter le fardeau de la culpabilité pour le restant de mes jours."

lundi 14 septembre 2015

"L'épouvantail" de Michael Connelly

"L'épouvantail" de Michael Connelly.
Ed. Points 2011. Pages 520.
Titre Original: "The Scarecrow"

Résumé: Viré du L.A. Times, le journaliste Jack McEvoy hésite entre le dégoût et la rage. Mais c’est la fierté qui finalement l’emporte : dans les quinze jours qu’il lui reste, il compte mener une enquête qui lui vaudra ? excusez du peu - le prix Pulitzer. Et les pontes de la direction n’auront plus que leurs yeux pour pleurer.
Son temps est compté, et a priori l’histoire d’Alonzo Winslow, un dealer meurtrier de 16 ans, n’a rien de prometteur : le gamin a avoué. Mais dans des conditions pour le moins douteuses…
Embarqué dans une aventure qui le dépasse, convaincu que la police a triché, Jack lance un S.O.S. à Rachel Walling, l’agent du FBI qu’il aime depuis toujours. Sans se douter que dans le même mouvement, il enclenche le piège machiavélique tendu par un tueur d’une intelligence et d’une cruauté ahurissantes.

La 7 de la page 7: "Ce n'était pas mon genre." 

Je reconnais que je ne suis pas une grande adepte des thrillers où on connaît déjà presque tout de la personne recherchée par le héro principal. Pourtant, ici, cela ne m'a absolument pas dérangée tant l'histoire est prenante et la plume efficace. 
Deuxième volet des aventures de Jack McEvoy qu'on avait déjà croisé dans "Le Poète". 
"L'épouvantail" est efficace et cohérent avec ce qu'on connaît déjà du personnage. Encore un très bon moment passé en compagnie de Connelly. 

Extrait: "Tout le monde me suivit des yeux lorsque je quittai le bureau de Kramer et retournai à mon box dans la salle de rédaction. Les regards étaient si appuyés que le trajet me parut interminable. Les avis de licenciement sortaient toujours le vendredi et tout le monde savait que je venais d'avoir l'entretien."  

"Underworld USA" de James Ellroy

"Underworld USA" de James Ellroy. 
Ed. Rivages/Noir 2011. Pages 923. 

Résumé: 24 février 1964, 7 h 16 du matin à Los Angeles. Attaque d'un fourgon blindé de la Wells Fargo. Quatre convoyeurs abattus, trois braqueurs morts ; le quatrième a pris la fuite en emportant seize sacs de billets et quatorze mallettes remplies d'émeraudes. C'est sur ce braquage, disséqué avec une maestria éblouissante, que s'ouvre Underworld USA, dernier volet de la trilogie commencée avec American Tabloid. Le narrateur reste dans l'ombre ; il a " suivi des gens, posé des micros et mis des téléphones sur écoute ". Il nous prévient que le livre est fondé sur " des documents publics détournés, des journaux intimes dérobés, la somme de mon expérience personnelle et quarante années d'études approfondies ". Le récit lui-même peut alors commencer, suite directe d'American Death Trip. Eté 1968 : Martin Luther King et Robert Kennedy ont été les victimes de conspirations meurtrières. La Convention démocrate de Chicago est sabotée par des spécialistes en coups fourrés. Howard Hughes s'est fait escroquer dans le rachat des casinos de Las Vegas par la mafia. Les militants noirs se préparent à l'insurrection dans les quartiers sud de Los Angeles, et le FBI, toujours sous la houlette de J. Edgar Hoover, utilise tous les moyens pour les détruire. A la croisée de ces événements, le destin a placé trois hommes : Dwight Holly, l'exécuteur des basses oeuvres de Hoover, Wayne Tedrow, ancien flic et trafiquant d'héroïne, et Don Crutchfield, jeune détective obsédé par les femmes. Dwight, Wayne, Don : leurs vies s'entrechoquent sur la piste de Joan Rosen Klein, la " Déesse rouge ", et chacun d'eux paiera " un tribut élevé et cruel à l'Histoire en marche ".

La 7 de la page 7: "Mon travail de surveillance établit le lien entre "Alors" et "Maintenant" d'une façon qui n'a jamais été révélée auparavant." 

Dernier tome de la trilogie "Underworld USA", Ellroy nous livre les clés de cette prodigieuse aventure. Il répond aux questions que l'on se posait (et répond même à celles qui ne nous avaient pas effleurées.) Qu'il est bon de se vautrer dans la vision paranoïaque d'un Ellroy au sommet de son art. 
On s'attache à la lie de l'humanité et on en reste le souffle coupé une fois que le destin les rattrape. Cette trilogie demande du temps et de la concentration mais que c'est bon de suivre ces personnages dans une histoire de l'Amérique "Made by Ellroy".

Extrait: "Le camion laitier braqua sèchement à droite et mordit le trottoir. Le volant échappa aux mains du chauffeur. Pris de panique, il écrasa les freins." 

 

"American Death Trip" de James Ellroy

"American Death Trip" de James Ellroy. 
Ed. Rivages/Noir 2012. Pages 951. 

Résumé: Dallas, novembre 1963. Le cœur du rêve américain explose. Un jeune flic de Las Vegas, avec 6000 dollars en liquide et un sale boulot à exécuter. il ne sait pas qu'il va faire partie du complot visant à étouffer la vérité sur l'assassinat de Kennedy. Il s'appelle Wayne Tedrow. Cinq années dans les coulisses de la politique vont le conduire de Dallas au Vietnam, en passant par le sud des États-Unis. Cinq années avec J. Edgar Hoover, Howard Hugues, la Mafia et le Ku Klux Klan.

La 7 de la page 7: "Il reconstitua les événements." 

On prend les mêmes (enfin presque) et on continue la saga Underworld USA de James Ellroy. Si le premier volet de la saga était déjà très réussi, le deuxième opus est époustouflant. 
Ellroy nous garde en apnée pendant 951 pages. Les personnages frôlent la perfection et Ellroy casse le rythme narratif de cette fabuleuse fresque avec le talent qu'on lui connaît. Du très grand polar. Du très grand Ellroy. 
Petit bémol: la lecture de ce deuxième tome requiert la lecture du premier volet. Non pas que l'histoire serait incompréhensible, juste moins savoureuse. 

Extrait: " On l'envoyait à Dallas descendre un maquereau nègre, un certain Wendell Durfee. Il n'était pas sûr d'en être capable. Son billet d'avion, c'était le syndicat des exploitants de casinos qui le lui payait. En première classe. Ils avaient ponctionné leur caisse noire. Pour lui graisser la patte. Six mille dollars cash." 

"American Tabloïd" de James Ellroy

"American Tabloïd" de James Ellroy. 
Ed. Rivages/Noir 2007. Pages 780. 

Résumé: Ancien flic, Pete Bondurant est un tueur. Il alimente le journal à potins du producteur Howard Hughes et dirige avec sa maîtresse Gail une officine de flagrants délits d'adultère. Kemper Boyd, du FBI, a été chargé par son patron Hoover d'infiltrer une commission d'enquête sur les rackets syndicalistes, tandis que son collègue Ward J. Littell espionne les réseaux communistes. John Stanton, agent de la CIA, est chargé de former militairement les expulsés cubains pour une opération de représailles.

La 7 de la page 7: "Il possède un baisoir à quelques blocs de là où il saute sa secrétaire, mais toi, tu insistes pour aller à l'Ambassador." 

Premier tome de la trilogie Underworld USA d'Ellroy, "American Tabloïd" met en place les intrigues qui feront de cette trilogie, une œuvre majeure de Ellroy. Il est vivement conseillé de commencer la trilogie par le début (comme toutes les sagas d'Ellroy...) 780 pages peuvent faire un peu peur, c'est vrai. Surtout que ce premier volet est un peu lent. Mais Ellroy prend le temps de bien mettre en place tous ses personnages. Et malgré une certaine lenteur et un nombre incalculable de personnages, on ne s'ennuie vraiment pas. Comme toujours, Ellroy est d'une efficacité redoutable. Chaque phrase a son importance. Une minute d’inattention et vous êtes perdus. Prenez bien votre temps, vous n'êtes pas à l'abri d'un retournement de situation vertigineux. 
Prenant et intelligent, on attend le deuxième tome avec impatience. 

Extrait: "L'Amérique n'a jamais été innocente. C'est au prix de notre pucelage que nous avons payé notre passage, sans regret sur ce que nous laissions derrière nous. Nous avons perdu la grâce et il est impossible d'imputer notre chute à un seul événement, une seule série de circonstances. Il est impossible de perdre ce qui manque à la conception." 

 

"Mr. Mercedes" de Stephen King

"Mr. Mercedes" de Stephen King.
Ed. Albin Michel 2015. Pages 473.

Résumé: Midwest 2009. Un salon de l'emploi. Dans l'aube glacée, des centaine de chômeurs en quête d'un job font la queue. Soudain, une Mercedes rugissante fonce sur la foule, laissant dans son sillage huit morts et quinze blessés. Le chauffard, lui, s'est évanoui dans la brume avec sa voiture, sans laisser de traces. Un an plus tard. Bill Hodges, un flic à la retraite, reste obsédé par le massacre. Une lettre du tueur à la Mercedes va le sortir de la dépression et de l'ennui qui le guettent, le précipitant dans un redoutable jeu du chat et de la souris.

La 7 de la page 7: ""C'est ce que je fais." 

Quand Stephen King s'attaque au polar, on peut dire qu'il n'y va pas avec le dos de la cuillère. Sur fond de critique sociale et de critique de la politique de l'emploi américaine, King met ici en place un roman efficace et pertinent. En effet, jamais rien n'est gratuit chez l'auteur américain. Chaque phrase est pesée et écrite en pleine conscience.
Non seulement les personnages sont efficaces mais King parvient à les rendre sympathiques. On partage leurs douleurs et leurs doutes. 
L'histoire, elle, fait penser à un bon vieux polar des années 50 mais avec cette touche bien actuelle qui rend la lecture de ce roman particulièrement agréable.
Vivement la suite! 

Extrait: "Hodges pensa, On s'est servi de ta voiture pour tuer huit personnes, peut-être plus, et toi, tu veux faire une sieste? Plus tard, il serait incapable de dire si c'était à cet instant précis qu'il avait commencé à la détester, mais c'est fort probable. Quand certaines personnes sont en détresse, on a envie de les prendre dans nos bras et de leur tapoter le dos en disant là, là. Mais il y en a d'autres à qui on a juste envie de foutre une bonne baffe dans la gueule en leur disant de se ressaisir et d'être un homme, bordel. Ou une femme, dans le cas de Mrs T."

"Millénium Tome 4: Ce qui ne me tue pas" de David Lagercrantz

"Millénium Tome 4: Ce qui ne me tue pas" de David Lagercrantz.
Ed. Actes Sud 2015. Pages 512.
Titre Original: Millenium, book 4: Det som inte dödar oss.

Résumé: Quand Mikael Blomkvist reçoit un appel d’un chercheur de pointe dans le domaine de l’intelligence artificielle qui affirme détenir des informations sensibles sur les services de renseignement américains, il se dit qu’il tient le scoop qu’il attendait pour relancer la revue Millénium et sa carrière. Au même moment, une hackeuse de génie tente de pénétrer les serveurs de la NSA...
Dix ans après la publication en Suède du premier volume, la saga Millénium continue.

La 7 de la page 7: "Et ressentit une indéfinissable vague d'émotion dont il s'étonna." 

Si un livre était bien attendu, c'était bien "Millénium Tome 4: Ce qui ne me tue pas" de Lagercrantz.   Reprendre cette saga comportait certains risques. Les lecteurs s'attendaient à retrouver Lisbeth et Mikael. Ceux de Larsson... Et, en ce qui concerne cette prise de risque, Lagercrantz relève le défi haut la main. Il reste fidèle aux personnages d'origine et on retrouve bien notre hackeuse et notre journaliste. Lagercrantz a bien fait ses devoirs en ce qui concerne cet aspect du livre. Mais malheureusement, la comparaison s'arrête là. 
Et pourtant, j'y ai cru! L'histoire était plutôt bien menée, dans ce style un peu lent mais à l'efficacité redoutable. Mais la fin est totalement baclée. Lagercrantz s'enferme et s'enlise dans une histoire qui lui échappe. Il essaie de s'en sortir par une pirouette (qui ouvre la porte à Millénium 5) mais ce n'est pas crédible. Et c'est bien dommage. Peut-être s'est-il trop concentré sur la prise en main des personnages... Et pas assez sur l'aboutissement de son histoire. 
Toutefois, tout n'est pas négatif dans le roman. Si Lagercrantz devait faire un "Millénium 5", il est probable que je le lise même si "Ce qui ne me tue pas" m'a fortement déçue. On est en droit d'espérer que, maintenant qu'il tient bien les personnages, il puisse, enfin (et avec moins de pression) mettre en place une histoire qui, elle, sera digne du "Millénium" de Larsson. 

Extrait: "Mikael ne savait pas vraiment à quoi il s'attendait, sans doute à un jeune des beaux-quartiers de Stureplan, un fils à papa. Mais ce fut un type miteux qui se présenta à lui. Un petit gars avec un jean troué, des longs cheveux foncés crasseux et un regard las, fuyant. Il avait dans les vingt-cinq ans, peut-être un peu moins. Une mèche lui barrait les yeux, il avait une vilaine peau et une sale plaie à la lèvre. Linus Brandell n'avait rien d'un homme assis sur le scoop du siècle."

"Millénium Tome 3: La reine dans le palais des courants d'air" de Stieg Larsson

"Millénium Tome 3: La reine dans le palais des courants d'air" de Stieg Larsson. 
Ed Actes Sud 2007. Pages 710. 
Titre Original: Millenium, book 3: Luftslottet som sprängdes. 

Résumé: Que les lecteurs des deux premiers tomes de la trilogie Millénium ne lisent pas les lignes qui suivent s'ils préfèrent découvrir par eux-mêmes ce troisième volume d'une série rapidement devenue culte. Le lecteur du deuxième tome l'espérait, son rêve est exaucé : Lisbeth n'est pas morte.
Ce n'est cependant pas une raison pour crier victoire : Lisbeth, très mal en point, va rester coincée des semaines à l'hôpital, dans l'incapacité physique de bouger et d'agir. Coincée, elle l'est d'autant plus que pèsent sur elle diverses accusations qui la font placer en isolement par la police. Un ennui de taille : son père, qui la hait et qu'elle a frappé à coups de hache, se trouve dans le même hôpital, un peu en meilleur état qu'elle... Il n'existe, par ailleurs, aucune raison pour que cessent les activités souterraines de quelques renégats de la Säpo, la police de sûreté. Pour rester cachés, ces gens de l'ombre auront sans doute intérêt à éliminer ceux qui les gênent ou qui savent. Côté forces du bien. on peut compter sur Mikael blomkvist, qui, d'une part, aime beaucoup Lisbeth mais ne peut pas la rencontrer, et, d'autre part, commence à concocter un beau scoop sur des secrets d'Etat qui pourraient, par la même occasion, blanchir à jamais Lisbeth. Mikael peut certainement compter sur l'aide d'Armanskij, reste à savoir s'il peut encore faire confiance à Erika Berger, passée maintenant rédactrice en chef d'une publication concurrente.

La 7 de la page 7: "L'intervention d'un neurochirurgien allait probablement s'imposer." 

Après un deuxième tome un peu plus faible que le premier, Larsson nous offre "La reine dans le palais des courants d'air", troisième volet de la trilogie "Millénium". 
Une fin en apothéose. Un véritable feu d'artifice. Tout ce qui fait un bon policier est dans ce livre. 
On quitte les personnages avec tristesse et déception de ne plus les revoir. 
Une trilogie maîtrisée de bout en bout par Larsson qui, décidément, nous a quitté trop tôt...
Une trilogie qui marquera certainement les esprits. 
A lire de toute urgence. 

Extrait: "Mikael Blomkvist ne voyait pas la voiture avec l'immatriculation K A B et n'avait pas le sentiment d'être surveillé, mais il préféra ne rien laisser au hasard le lundi lorsqu'il se rendit de la librairie universitaire à l'entrée secondaire du grand magasin NK pour ressortir aussitôt par l'entrée principale." 

"Millénium Tome 2: La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette" de Stieg Larsson

"Millénium Tome 2: La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette" de Stieg Larsson. 
Ed. Actes Sud 2006. Pages 652. 
Titre original: Millenium, book 2: Flickan som lekte med elden. 

Résumé: Tandis que Lisbeth Salander coule des journées supposées tranquilles aux Caraïbes, Mikael Blomkvist, réhabilité, victorieux, est prêt à lancer un numéro spécial de Millénium sur un thème brûlant pour des gens haut placés : une sombre histoire de prostituées exportées des pays de l'Est. Mikael aimerait surtout revoir Lisbeth. Il la retrouve sur son chemin, mais pas vraiment comme prévu : un soir, dans une rue de Stockholm, il la voit échapper de peu à une agression manifestement très planifiée. Enquêter sur des sujets qui fâchent mafieux et politiciens n'est pas ce qu'on souhaite à de jeunes journalistes amoureux de la vie. Deux meurtres se succèdent, les victimes enquêtaient pour Millénium.
Pire que tout, la police et les médias vont bientôt traquer Lisbeth, coupable toute désignée et qu'on a vite fait de qualifier de tueuse en série au passé psychologique lourdement chargé. Mais qui était cette gamine attachée sur un lit, exposée aux caprices d'un maniaque et qui survivait en rêvant d'un bidon d'essence et d'une allumette ? S'agissait-il d'une des filles des pays de l'Est, y a-t-il une hypothèse plus compliquée encore ?

La 7 de la page 7: "Elle avait des cheveux châtains mi-longs, un visage ovale et un corps mûr qui aurait pu sortir tout droit d'un catalogue de vente par correspondance, aux pages sous-vêtements." 

Deuxième tome de la saga "Millénium", "La fille qui rêvait d'un bidon d'essence et d'une allumette" continue de nous emmené dans l'univers noir de Lisbeth. En effet, si Larsson nous envoie d'abord sur des pistes différentes, celles-ci ne mènent qu'à un seul endroit: Miss Salander. 
Ce tome est surtout centré sur la hackeuse de génie. On en apprend plus sur elle et sur son passé. On comprend de mieux en lieux pourquoi Lisbeth est devenue ce qu'elle est! 
Les personnages sont toujours aussi efficaces et l'histoire tient toujours la route. 
Il y a cependant un petit bémol à mentionner: ce tome deux semble être, surtout, une transition vers le troisième volet. On sent que l'intrigue du roman n'est qu'un prétexte, une sorte d'introduction à ce qui va suivre. 
Un conseil? Continuez immédiatement le troisième volet pour continuer cette histoire qui continue de nous scotcher page après page. 

Extrait: "Quand Mikael Blomkvist revint à la rédaction après son déjeuner tardif, il alla directement s'enfermer dans son bureau, signalant ainsi qu'il ne voulait pas être dérangé. Il n'avait pas encore le temps de s'occuper de toute l'information secondaire dans les mails et les notes de Dag Svensson. pour l'heure, il fallait qu'il réexamine le livre aussi bien que les articles d'un œil nouveau, sachant désormais que l'auteur était mort et ne pouvait plus répondre aux questions pointues." 
 

"Millénium: Les hommes qui n'aimaient pas les femmes" de Stieg Larsson

"Millénium: Les hommes qui n'aimaient pas les femmes" de Stieg Larsson. 
Eds. Actes Sud 2006. Pages 574. 
Titre Original: Millenium, book 1: Män som hatar kvinnor. 

Résumé: Ancien rédacteur de Millénium, revue d'investigations sociales et économiques, Mikael Blomkvist est contacté par un gros industriel pour relancer une enquête abandonnée depuis quarante ans. Dans le huis clos d'une île, la petite nièce de Henrik Vanger a disparu, probablement assassinée, et quelqu'un se fait un malin plaisir de le lui rappeler à chacun de ses anniversaires. Secondé par Lisbeth Salander, jeune femme rebelle et perturbée, placée sous contrôle social mais fouineuse hors pair, Mikael Blomkvist, cassé par un procès en diffamation qu'il vient de perdre, se plonge sans espoir dans les documents cent fois examinés, jusqu'au jour où une intuition lui fait reprendre un dossier. Régulièrement bousculés par de nouvelles informations, suivant les méandres des haines familiales et des scandales financiers. lancés bientôt dans le monde des tueurs psychopathes, le journaliste tenace et l'écorchée vive vont résoudre l'affaire des fleurs séchées et découvrir ce qu'il faudrait peut-être taire. 

La 7 de la page 7: "Du mauvais côté du micro"

Premier tome de la saga "Millénium", "Les hommes qui n'aimaient pas les femmes" est plutôt une réussite. Une belle réussite. Dans le style procédural, cher à la littérature policière suédoise, ce premier volet de la série nous fait trépigner d'impatience pour le second tome. 
L'histoire est efficace et les personnages diablement intéressants et attachants. On passe de Blomkvist à Salander avec un plaisir jouissif. On reste en apnée en suivant leurs aventures. 
Là où Larsson fait carton plein, c'est dans le choix paradoxal de ses protagonistes qui tiennent plus de l'anti-héro qu'autre chose. Ils portent leurs cicatrices avec fierté et sont le résultat de leurs choix et de leurs inactions. 
Un pur régal. 
Vite... La suite! 

Extrait: "En CM2, Lisbeth Salander avait eu des démêlés avec un garçon beaucoup plus grand et fort qu'elle. D'un point de vue purement physique, elle n'avait pas représenté un grand obstacle pour lui. Pour commencer, il s'était amusé à la faire tombé plusieurs fois, puis il l'avait giflée quand elle essayait de contre-attaquer. Rien à faire, malgré sa supériorité, cette idiote continuait à le chercher, et au bout d'un moment même les autres élèves avaient commencé à trouver que ça allait trop loin. Elle était si manifestement sans défense que ça en devenait pénible. Finalement, le garçon lui avait balancé un coup de poing magistral qui lui avait fendu la lèvre et lui avait fait voir trente-six chandelles. Ils l'avaient abandonnée par terre derrière le gymnase. Elle était restée à la maison deux jours. Au matin du troisième jour, elle attendait son tortionnaire avec une batte de base-ball et la lui abattit sur l'oreille. Ceci lui valut une convocation chez le principal qui décida de porter plainte contre elle pour coups et blessures, ce qui eut pour résultat une enquête sociale."

"Le Square" de Marguerite Duras

"Le Square" de Marguerite Duras. 
Ed. Folio 1983. Pages 154. 

Résumé: C'étaient des bonnes à tout faire, les milliers de Bretonnes qui débarquaient dans les gares de Paris. C'étaient aussi les colporteurs des petits marchés de campagne, les vendeurs de fils et d'aiguilles, et tous les autres. Ceux - des millions - qui n'avaient rien qu'une identité de mort.
Le seul souci de ces gens c'était leur survie : ne pas mourir de faim, essayer chaque soir de dormir sous un toit.
C'était aussi de temps en temps, au hasard d'une rencontre, Parler. Parler du malheur qui leur était commun et de leurs difficultés personnelles. Cela se trouvait arriver dans les squares, l'été, dans les trains, dans ces cafés des places de marché pleins de monde où il y a toujours de la musique. Sans quoi, disaient ces gens, ils n'auraient pas pu survivre à leur solitude.

La 7 de la page 7: "C'est à dire qu'il semblerait qu'on à voyager ainsi tout le temps, on doive un jour vouloir s'arrêter, c'est dans ce sens-là que je vous le demandais." 

Un square. Deux personnages qui discutent de leur vie, de leurs peurs sans jamais vraiment se révéler. Cela résume assez bien "Le Square" de Duras. Si l'annonce est alléchante, je me suis ennuyée ferme! Non pas que le texte est mal écrit ou que les personnages ne sont pas intéressant. Je me suis juste sentie totalement exclue de ce récit. 
L'homme et la femme discutent et leurs propos sont intéressants mais ne permettent pas à ce que l'on s'attache à eux. Impossible de se sentir investi dans un roman qui semble ne pas nous être adressé. 
Certainement pas le meilleur moyen de commencer Duras! 

Extrait: "-Mais, Mademoiselle, comment arriveriez-vous à ne pas vouloir quelque chose tout en la voulant tellement?
             - C'est ce que je me suis dit, oui et, à vrai dire, cette manière-là, je ne l'ai jamais trouvée bien sérieuse."