mardi 22 septembre 2015

"Contes de la folie ordinaire" de Charles Bukowski.

"Contes de la folie ordinaire" de Charles Bukowski.
Ed. Le Livre de Poche 2011. Pages 254.
Titre Original: Erections, ejaculations, exhibitions and general tales of ordinary madness & The most beautiful woman in the world.

Résumé: C'est le moment de s'embarquer dans le bateau ivre de Bukowski, l'écrivain poète, né Allemand, citoyen américain par adoption des rues et des bars, témoin des clameurs urbaines... Virons donc du côté d'une folie ordinaire, celle qui sommeille en chaque individu, celle qui vous prend aux tripes un beau matin et fait du corps une marionnette dont on tire les fils, celle qui s'immisce, reptilienne et ne se tait qu'à la mort.
Bukowski délivre aux lecteurs qui veulent bien le suivre dans sa démarche, les contes quelques peu exubérants de cette lente conquête de la déchéance. D'abord abrupte, trash, la folie se coule peu à peu dans la vie et se fait plus mature. Elle gagne en âge et arrondit les angles, estompe sa vulgarité, s'intériorise, pour finir par adopter le corps physique qu'elle habite. Sexe, alcool, et courses de chevaux sont son lot quotidien : Bukowski parle de Bukowski ; ou plutôt de son double, son extension littéraire au prénom poussif : Hank. Le barfly jubile de son petit tour d'auto-parodie. Il en rajoute avec quelques portraits taillés serrés : des ouvriers alcooliques, des jeunes auteurs déjà accomplis dont l’œuvre le révulse et qui lui renvoient l'image insupportable de son parcours d'écrivain à succès. Car Bukoswki vomit à la face de ses contemporains. Il vomit aussi ses pages, et vous somme de prendre son parti ou de le fustiger.
Certes, l'auteur ne laisse pas indifférent, à la première lecture assurément... à la seconde, on se surprend à trouver les limite de ce trash qui apparaît finalement presque désuet. Et pourtant, cette thématique poursuit sa route, se charge d'une iconographie nouvelle, s'enrichit, s'épanouit, se modèle à l'image du monde moderne. Le trash est clean... il suffit de regarder du côté de la bande d'Irvine Welsh. Changement d'époque, mais même folie... Bukowski a fait des petits ! 

La 7 de la page 7 : "Jolie n'est pas le mot, c'est même presque impoli." 

Dès que j’entends le nom de Bukowski, je pense "Génie". Il fait partie de ces auteurs qui n'ont pas réellement l'attention qu'ils devraient avoir. 
Certes, il n'écrit pas pour les petites filles sages (quoique) et son style est brutal frôlant la vertu de ses mots acerbes et bien choisis.  

Mais commençons par le début, "Contes de la folie ordinaire"compte: 
- Le jour où j'ai rencontré Bukowski. 
- La plus jolie fille de la ville. 
- La vie dans un bordel au Texas. 
- Le petit ramoneur. 
- La machine à baiser. 
- Trois femmes. 
- Trois poulets. 
- Douze singes volants qui ne sont jamais arrivés à baiser. 
- Vie et mort d'un journal underground. 
- Le jour où nous avons parlé de James Thurber. 
- La politique est l'art d'enculer les mouches. 
- Autant qu'on veut. 
- La chatte blanche. 
- J'ai vécu avec l'ennemi numéro 1. 
- Comme au bon vieux temps. 
- Le grand mariage zen. 
- Cons comme le Christ. 
- Pas de chaussettes. 
- J'ai descendu un type à Reno. 
- Carnet d'un suicidé en puissance.
- Le zoo libéré. 

On ne pourra pas nous reprocher de ne pas être exhaustif. 

Venons-en maintenant à ce diable de Bukowski. De quoi traitent ses "Contes de la folie ordinaire"?  De sexe, d'alcool, de critique de la société... Oui, oui, tout ça. Mais bien plus encore. Bukowski met en scène son double littéraire et le place dans des situations rocambolesques. Et tout y passe! La gauche, la droite, les femmes, les hommes, les idiots, les intellectuels (ou du moins ceux qui croient l'être) tout le monde en prend pour son matricule. Mais là où Bukowski tient du Génie, c'est qu'il le fait l'air de rien. La première lecture se fait au premier degré, la deuxième au deuxième et ainsi de suite. 
Alors imaginez quand vous l'aurez lu au moins quatre fois! Chaque histoire possède une multitude de sous-couches. On a toujours plaisir à se vautrer dans l'atrocité des propos de Bukowski qui se pose en ange déchu par la vie et qui ne peut plus rien ni pour nous ni pour se monde dont il se fout totalement. 
Aussi bien de part ses sujets que son écriture, Bukowski déroute son lecteur. Il le provoque avec ses propos grossiers, misogynes et sexuellement explicites. Et en même temps, on ne peux pas vraiment lui en vouloir tant le style nous ressemble.  Il y a un être humain en-dessous, un vrai. Un qui ne se cache pas. On a tous un Bukowski en nous. Même si on nie totalement cette part de nous, Bukowski nous met devant le fait accompli: Nous sommes tous fous et c'est devenu normal. Alors soyons et surtout restons fous jusqu'au bout. 
Bukowski parle de la misère comme personne. Certes elle est sexuelle (parfois intellectuelle ou sociale) mais elle est tellement humaine qu'on se surprend à vouloir prendre cet obsédé sexuel dans ses bras et de lui dire, qu'un jour, ça ira mieux. On lui ment, on se ment, on se bukowskise.

Extraits: "La beauté n'existe pas, la beauté ne dure pas. Toi, tu es laid, et tu ne connais pas ta chance: au moins, si on t'aime, c'est pour une autre raison." 
"Il n'y a que les pauvres qui connaissent la vie; pas les riches ni les planqués. Là bizarrement, je me suis à penser aux Chinois. Les Russes avaient molli; si ça se trouvait, les seuls à connaître la vie étaient les Chinois, les seuls qui piochent la merde, qui crachent le ramollo. Pourtant je ne fais pas de politique, trop d'arnaques: l'Histoire nous encule toujours et tous, à la fin des fins." 


 

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